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Exposition
Les "Chemins vers l'invisible" rendus éclatants par la coloriste Nansky
Publié le 22/06/2024 à 07h30
Avec « Connexion », Nansky dépeint une ambiance orageuse, un ensemble électrique, qui parfois, dans l’air, demeurent invisibles. © Marie-Edwige HEBRARD
Nansky a posé ses toiles, tout en abstraction, au centre d’art Jean-Prouvé d'Issoire (Puy-de-Dôme). Elle y montre Les chemins invisibles. Une première pour elle "et un honneur" souligne-t-elle, intimidée.
Il y a chez Nansky, une urgence, une impétuosité. De
celles qui s’expriment chez les personnes qui se sont trop tues. "Jusqu’à 18 ans, je ne parlais pas", dit d’un trait et en riant celle qui s’exprime doublement aujourd’hui : du son de sa voix
mais aussi avec ses pinceaux.
L’enfant contemplative s’est jetée à l’eau quand un marchand d’art, qui s’est penché sur ses dessins, lui a adressé l’injonction de peindre. "J’étais complètement autodidacte. Je le suis toujours
d’ailleurs..." Ce conseil devient libérateur. Nansky explore alors la couleur, dans l’abstraction.
Variations sur le même thème : le Covid
Au centre d’art Jean-Prouvé, elle présente plusieurs de ses travaux. "C’est la première fois que j’expose dans un centre d’art. C’est un vrai honneur", souligne-t-elle, encore intimidée alors que plusieurs galeries lui ont déjà ouvert ses portes. C’est pourtant bien elle qui a tapé sur l’épaule du Destin, en déposant un livret de ses œuvres après une visite de celui de Jean-Prouvé.
Dès l’entrée, un de ses projets, conceptuel et jusqu’alors inédit : une production sérielle, en mini-format, sur laquelle elle a travaillé en 2020. Une sorte de variation sur le même thème, mois après mois, autour d’un événement catalyseur de réactions parfois assez dissemblables, mais qui nous a tous été donné d’expérimenter en même temps : l’apparition de l’épidémie de Covid dans notre espace-temps.
Chacun chez soi du mois de mars ; Le chaos d’avril, L'Insouciance de juillet, jusqu’à Nick Covid de décembre : avec l’aide d’une complice écrivaine, Marie-Pierre Bouchot, Nansky vient revisiter ces 12 mois pas comme les autres, mais qui ont eu quelque chose d’universel : nous donner à tous exactement la même situation à vivre. Au même moment.
Trois thèmes principaux à parcourir
Puis l’exposition, en elle-même, intitulée Chemins vers l’invisible, invite les visiteurs à aller au-delà des perceptions à travers trois thèmes majeurs : la nature, la spiritualité et la guerre.
Quand j’étais petite, la nature c’était très important. Je regardais beaucoup les pierres, les murs. Dans la vigne vierge du jardin familial, il y avait des bestioles. Je voyais des formes. Ça m’inspirait se souvient celle qui a passé plusieurs étés du côté de Manzat. Écouter, contempler, observer : à cette époque-là, Nansky engrange les sensations, les émotions.
Un monde intérieur foisonnant
"Enfant, dès que je formulais des phrases, on me disait que c’était mal dit, pas bien." Elle garde alors tout pour elle, au-dedans. Et consolide un monde intérieur, vif, bouillonnant. Qui, en rejaillissant, va se révéler extrêmement cadré, ligné, presque mathématique tant il est ordonné.
Les murs qui entouraient, hier, le jardin de son enfance, se transforment, sous sa peinture, en des mosaïques bleutées comme autant de possibilités d’interstices au travers desquels elle engage le visiteur à imaginer. Comme elle l’a fait. Comme elle continue de le faire. Entre curiosité et fascination
Un espace mystérieux et sacré
Une fascination qui s’est aussi manifestée, chez Nansky, face aux vitraux dont elle s’est aussi largement inspirée et qui impriment d’autres de ses réalisations. Rosaces, flèches de cathédrales, gemmaux mystiques : son travail en abstraction, apaisé, est présenté dans une salle dédiée du centre d’art Jean-Prouvé, plongée dans l’obscurité et éclairée à la lumière noire, sur le thème de la spiritualité, tandis qu’un ultime espace est consacré à un univers radicalement opposé : Désolé, en ruines.
Je voulais évoquer les conséquences des guerres, souvent invisibles, des années après. Il y a des cicatrices partout : sur les corps, dans la mémoire et sur les paysages
.Évoqués de façon sérielle ou bien figurés dans des scènes apocalyptiques, les conflits sont là, déclinés dans leur épouvantable répétition. "Cette salle est là pour faire réagir. Je suis traversée, impactée par l’actualité. La guerre me bouleverse : elle se retrouve fatalement dans mes peintures".
Marie-Edwige HEBRARD
La Montagne, le 22 juin 2024
L’univers de la peintre Nansky est constitué de quatre piliers. Les couleurs éclatantes, fille d’imprimeur oblige, la passion du vitrail, un amour pour les murs de pierres, véritables madeleines de Proust, et la joie d’obtenir les reflets dans l’eau.
À ce carré magique viennent se greffer les affres de l’actualité. Et elles ont été tonitruantes ces derniers mois au cours desquelles la peintre a donné naissance à ses îles colorées, thème de la nouvelle exposition proposée à la galerie Sophie Lévêque jusqu’au 23 juillet. Un archipel, comme des pensées qui se croisent, s’entrechoquent au gré des évènements. La guerre bien sûr, omniprésente. Un monde rude, glacé, que l’artiste qui aime faire rêver ne peut s’empêcher d’embellir, de rendre plus léger. Pour cela rien de tel qu’un bol d’air frais marin, qu’une balade en forêt enchantée. Une flânerie enfantine contée qui invite tantôt à une danse aquatique, tantôt à une plongée au cœur d’un récif corallien. Et même si la noirceur tente de nous cerner, toujours l’éclat triomphe, libérateur.
[…] Nansky a accroché vingt toiles de tailles différentes. Des compositions abstraites, des lignes qui parfois se croisent, d’autres rectilignes. Cela ressemble à un relevé topographique aux couleurs douces, mais éclatantes. Souvent, l’artiste reproduit à l’acrylique, matériau dont elle use, la technique du vitrail, entourant de noir la forme choisie.
Mais, curiosité un peu cachée par la porte d’entrée, une toile de petite dimension, d’une facture différente, attrape le regard et c’est comme un coup-de-poing dans l’estomac, tant on ressent la barbarie, la mort. Cette toile, Nansky l’a réalisée après les évènements tragiques survenus sur le territoire. Elle l’a nommée Attentats. Ses sentiments, son désespoir, elle les a jetés sur le support, et c’est comme un petit coin de Guernica de Picasso. Impressionnant, émouvant, il n’y a pas de mots pour exprimer le ressenti. […]